C'est l'effet 8 mai...
Levé difficile après avoir mal dormi. C'est le thé, trop fort et trop tard, ou alors c'est moi qui ne suis qu'une chiffe molle. La journée est déjà longue.
Dans le RER je me dis que je n'arriverai pas au bout. Un courant d'air un peu trop froid, et puis une vision très rapide d'un noël d'il y a quelques années. Je suis tellement hébété que je vais presque pleurer, comme un vieux clochard qui aurait trop bu et qui verse dans la sensiblerie. Je me sens minable et sale, malgré la longue douche de ce matin.

Lui il savait qu'il fallait être fort. Il me racontait souvent son premier boulot de nuit,
quand il avait 16 ans à peine. Toute une nuit à l'atelier, entre les étincelles et l'acide. Mais moi je ne suis pas toujours fort comme lui. Cette ville pourrie, ces bidonvilles verticaux, ce collège hideux en béton armé, parfois la laideur devient intolérable.
Il avait 16 ans et faisait les 3/8. J'en ai 24 et je donne 16 heures de cours par semaine. Et il y aura bientôt un an.

Mes chances de gagner au loto et de m'enfermer dans une bibliothéque sont d'une sur plus de 2 millions. Alors qu'est ce que je pouvais faire d'autre? Se redresser et serrer les dents.