Malgré un petit début de grippe et une voix presqu'éteinte je suis allé au 20 ans de la khâgne du lycée Lakanal. C'était une bonne occasion pour revoir ce qui fut mon ancien collège et lycée. Paradoxalement je n'ai jamais fréquenté cette khâgne, mais le hasard avait fait que je pouvais venir participer à la petite sôtterie. De la réception en elle même pas grand chose. J'étais là pour le lieu, pour retrouver le jeune homme que j'ai laissé il y a déjà sept ans.
Les souvenirs sont revenus très rapidement. Pas forcément les plus illustres, plutôt un faisceau de détails. L'endroit où l'on rangeait les haies après l'EPS, le bruit des feuilles pourrissantes d'humidité lorsqu'on marche dans la cour, l'odeur des vieux escaliers. Dans ce monument très IIIème République il y a peu de choses qui ont été modifiées en profondeur. Penser que des gens comme Jacques Rivière ou Alain Fournier ont fait résonner leurs pas sous les mêmes vieilles arcades est finalement assez normal au sein de cette atmosphère de "vieille élite des lettres française".
Malgré tout je reste attaché à ce lieu. Malgré les profs de plus de 55 ans ayant ce poste comme les maréchaux ont leurs bâtons, malgré les élèves issus de la grande bourgeoisie et malgré ma jeunesse passée ici, à me confondre avec la couleur des murs. C'est là que j'ai grandi, que j'ai compris la place des livres dans ma vie et la malédiction qu'il y a à mettre sa vie intérieure au dessus du reste.
En rentrant chez moi je n'étais pas triste. Pas de "mon dieu, ce que j'ai vieilli !" Je sais bien que je ne suis plus le même qu'à 17 ans. J'étais serein, je me disais que tout ceci était bien, qu'il est normal et salutaire que le temps passe. L'important c'est qu'il existe des lieux dans une vie où l'on peut revenir humblement chercher le fantôme de ce que l'on fut. Et peut-être un jour, pourquoi pas, revenir ici en tant que professeur.
Qui sait ?